h ô t e l .; p a r t i c u l i e r

r é c e p t i o n ;;v e s t i b u l e;;c h a m b r e . 1 3;;b a r ; d e ; n u i t;;r o o m ; s e r v i c e;;r é c l a m a t i o n s

1 3 ; l i v r e s

{back}

b e l l e ; d u ; s e i g n e u r ; ;

a l b e r t ; c o h e n

[ elle raccrocha, lui reprit l’éther, aspira longuement, les yeux fermés, toute au froid sucré qui entrait. ]

…solal et arianel……belle du seigneur fragile cathédrale littéraire de pulsions et de mots…

…publié en 1968, juste avant l’année érotique…

[ Elle lui tendit les mains. Il les prit, et il plia le genou devant elle. Inspirée, elle plia le genou devant lui, et si noblement qu'elle renversa la théière, les tasses, le pot à lait et toutes les rondelles de citron. Agenouillés, ils se souriaient, dents éclatantes, dents de jeunesse. Agenouillés, ils étaient ridicules, ils étaient fiers et beaux, et vivre était sublime. ]

c r o n o p e s ; e t ; f a m e u x ;

j u l i o ; c o r t a z a r

[ préambule aux instructions pour remonter une montre

Penses-y bien : lorsqu’on t’offre une montre, on t’offre un petit enfer fleuri, une chaîne de roses, une geôle d’air. On ne t’offre pas seulement la montre, joyeux anniversaire, nous espérons qu’elle te fera de l’usage, c’est une bonne marque, suisse à ancre à rubis, on ne t’offre pas seulement ce minuscule picvert que tu attacheras à ton poignet et promèneras avec toi. On t’offre – on l’ignore, le plus terrible c’est qu’on l’ignore -, on t’offre un nouveau morceau fragile et précaire de toi-même, une chose qui est toi mais qui n’est pas ton corps, qu’il te faut attacher à ton corps par son bracelet comme un petit bras désespéré agrippé à ton poignet. On t’offre la nécessité de la remonter tous les jours, l’obligation de la remonter pour qu’elle continue d’être une montre ; on t’offre l’obsession de vérifier l’heure aux vitrines des bijoutiers, aux annonces de la radio, à l’horloge parlante. On t’offre la peur de la perdre, de te la faire voler, de la laisser tomber et de la casser. On t’offre sa marque, et l’assurance que c’est une marque meilleure que les autres, on t’offre la tentation de comparer ta montre aux autres montres. On ne t’offre pas une montre, c’est toi le cadeau, c’est toi qu’on offre pour l’anniversaire de la montre. ]

l o l i t a

v l a d i m i r ; n a b o k o v

[ Lo éclata de rire et s’enfuit de la pièce en m’effleurant au passage. Mon cœur semblait être partout à la fois. ]

[ Telle la traîne d’une étoile filante, le geste fatal sillonna l’écran opaque de mes pensées criminelles, en un horrible ballet silencieux ; le danseur agrippant le pied de la ballerine et l’entraînant à travers les ténèbres liquides.

Et là, à moins de six pouces de moi et de ma vie embrassée, ma nébuleuse Lolita dormait ! Une fois de plus, après une longue attente immobile, j’étendis vers elle mes tentacules et, cette fois, le grincement du sommier ne l’éveilla point. ]

f r a g m e n t s ; d ; ;u n ; d i s c o u r s ; a m o u r e u x ;

r o l a n d ; b a r t h e s

[ ANGOISSE. Le sujet amoureux, au gré de telle ou telle contingence, se sent emporté par la peur d’un danger, d’une blessure, d’un abandon, d’un revirement – sentiment qu’il exprime sous le nom d’angoisse.

1. Ce soir je suis revenu seul à l’hôtel ; l’autre a décidé de rentrer plus tard dans la nuit. Les angoisses sont déjà là, comme le poison préparé (la jalousie, l’abandon, l’inquiétude) ; elles attendent seulement qu’un peu de temps passe pour pouvoir décemment se déclarer. Je prends un livre et un somnifère, « calmement ». Le silence de ce grand hôtel est sonore, indifférent, idiot (ronron lointain des baignoires qui se vident) ; les meubles, les lampes sont stupides ; rien d’amical où se réchauffer (« J’ai froid, rentrons à Paris »). L’angoisse monte ; j’en observe la progression, comme Socrate devisant (moi lisant) sentait s’élever le froid de la ciguë ; je l’écoute se nommer, s’enlever, telle une figure inexorable, sur le fond des choses qui sont là.
(Et si, pour que quelque chose se passe, je faisais un vœu ?).
]

l e ; c o n t r e ; - ; c i e l

r e n é ; d a u m a l

extrait de La Néante

[ Pour ta gloire, non pour la mienne, ce carnage,
et sans colère. Ce n’était rien de renier le monde,
de tuer le soleil, de tout trahir pour toi,
d’assassiner les larves-reflets de moi-même,
ce n’était rien de me crever les yeux :
j’étais sûr de toi comme de ma mort,
j’étais sûr de la toute-évidence de ma nuit
qui est ton corps de silence vivant.

Mais des fantômes de toi-même sont venus,
les vampires de soie me consolaient trop bien,
la mort vivant trop bien dans les ombres du jour,
le temps maudit et toujours neuf s’est renoué.
]

La Seule

l e s ; b é b é s ; d e ; l a ; c o n s i g n e ; a u t o m a t i q u e

m u r a k a m i ; r y û

…deux bébés retrouvés dans la consigne d’une gare et la recherche de l’éternel et introuvable battement du cœur maternel…

[ le cœur de Hashi se serrait chaque fois qu’il apercevait la vieille. Il en parlait souvent à Kiku : Chaque fois que je vois une mendiante ou une vagabonde, ça me fait un coup au cœur, je me demande si ce n’est pas la femme qui m’a mis au monde. Quand je vois cette petite vieille malpropre, toujours seule, qui mendie des restes de riz, et son regard servile, ça m’est insupportable. Je me dis, c’est sûr que ma maman doit être malheureuse comme ça puisqu’elle m’a abandonné, hein, elle ne peut pas être heureuse avec un crime pareil sur la conscience, et quand je vois une vieille comme ça, en même temps j’ai envie de la serrer dans mes bras et de l’appeler maman, mais peut-être aussi que si c’était vraiment ma mère, je la tuerais. […]
Il la vit ce jour-là sortir un vieux bout de tissu violet d’une poubelle, le draper autour de ses épaules et de ses hanches, puis voyant qu’il n’était pas assez grand pour en faire un vêtement, le laisser s’envoler dans le vent
. ]

v o y a g e ; a u ; b o u t ; d e ; l a ; n u i t

l o u i s ; - ; f e r d i n a n d ; c é l i n e

[ Ce monde n'est qu'une immense entreprise à se foutre du monde. ]

…son roman le plus beau. le plus méchant aussi selon lui…

[ Figurez-vous qu’elle était debout leur ville, absolument droite. New York c’est une ville debout. On en a déjà vu nous des villes bien sûr, et des belles encore, et des ports et des fameuses même. Mais chez nous, elles sont couchées les villes, au bord de la mer ou sur les fleuves, elles s’allongent sur le paysage, elles attendent le voyageur, tandis que celle-là, l’Américaine, elle ne se pâmait pas, non, elle se tenait bien raide, là, pas baisante du tout, raide à faire peur. ]

a l c o o l s

g u i l l a u m e ; a p o l l i n a i r e

[ Et tu bois cet alcool brûlant comme ta vie Ta vie que tu bois comme une eau de vie ]

Extrait de 1909

[ La dame en robe d’ottoman violine
Et en tunique brodée d’or
Décolletée en rond
Promenait ses boucles
Son bandeau d’or
Et traînait ses petits souliers à boucles

Elle était si belle
Que tu n’aurais pas osé l’aimer

J’aimais les femmes atroces dans les quartiers énormes
Où naissaient chaque jour quelques êtres nouveaux
Le fer était leur sang la flamme leur cerveau
J’aimais j’aimais le peuple habile des machines
Le luxe et la beauté ne sont que son écume
Cette femme était si belle
Qu’elle me faisait peur
]

l a ; m a i s o n ; d e s ; f e u i l l e s

m a r k ; z. ; d a n i e l e w s k i

[ Je fais encore des cauchemars. D’ailleurs, j’en fais si souvent que je devrais y être habitué depuis le temps. Ce n’est pas le cas. Personne ne s’habitue vraiment aux cauchemars. ]

…l’incipit était pourtant formel : « Ceci n’est pas pour vous »…

…mais je suis quand même entrée dans la maison, à pas de loup…

[ …au début du mois de juillet 1990, les Navidson s’envolèrent pour Seattle afin d’assister à un mariage. A leur retour, quelque chose avait changé dans la maison. Bien qu’ils ne se fussent absentés que quatre jours, le changement était énorme. Il n’était pas, toutefois, évident – par exemple dans le cas d’un incendie, d’un cambriolage, ou d’un acte de vandalisme. Bien au contraire, l’horreur était atypique. Nul ne pouvait nier qu’il y avait eu intrusion, mais c’était si étrange que personne ne sut comment réagir…
En leur absence, la demeure des Navidson était devenue quelque chose d’autre, et sans être exactement sinistre ou même menaçant, le changement réduisait néanmoins à néant tout sentiment de sécurité ou de bien-être.
]

"Il ne serait pas honnête vis-à-vis du lecteur de ne pas avouer que La Maison des feuilles n’atteint jamais moins que trois niveaux de sens différents – qui en révèlent ensuite plusieurs autres. Le livre cherche constamment à construire une relation privilégiée entre le lecteur et les mots, créant ainsi un espace dans lequel l’intimité d’une imagination puisse se déployer. "
M. Z. Danielewski

l e t t r e ; d ; ; u n e ; i n c o n n u e

s t e f a n ; z w e i g

[ Je pressais convulsivement mes pieds l’un contre l’autre, mes bras tremblaient, et j’étais sans cesse obligée de me lever, tellement il faisait froid dans cette atroce obscurité. Mais je t’attendais, je t’attendais, je t’attendais comme mon destin. ]

[ […] Le romancier regarda les lettres avec indolence et déchira quelques enveloppes dont les expéditeurs l’intéressaient. Tout d’abord, il mit de côté une lettre dont l’écriture lui était inconnue et qui lui semblait trop volumineuse. Le thé était servi ; il s’accouda commodément dans son fauteuil, parcourut encore une fois le journal et quelques imprimés ; enfin il alluma un cigare et prit la lettre qu’il avait mise de côté.
C’était environ deux douzaines de pages rédigées à la hâte, d’une écriture agitée de femme, un manuscrit plutôt qu’une lettre […]

[…] je croisai tes pas ; nous nous heurtâmes presque. Tu me regardas de ce regard chaud, doux et enveloppant qui était comme une tendresse ; tu me souris d’une manière que je ne puis qualifier autrement que de tendre […] ; chez toi ce regard n’a rien de conscient, il n’y a en lui ni volonté, ni attachement ; c’est que ta tendresse pour les femmes, tout inconsciemment, donne un air doux et chaud à ton regard, lorsqu’il se tourne vers elles. Mais moi, une enfant de treize ans, je n’avais pas idée de ce trait de ton caractère : je fus comme plongée dans un fleuve de feu. Je crus que cette tendresse n’était que pour moi, pour moi seule ; cette unique seconde suffit à faire une femme de l’adolescent que j’étais, et cette femme fut à toi pour toujours. ]

e u r e k a ; s t r e e t

r o b e r t ; m c ; l i a m ; w i l s o n

[ Toutes les histoires sont des histoires d'amour. ]

…un livre jubilatoire dans lequel une poignée de personnages survivent dans le décor fragile de belfast…

…une inscription étrange que l’on retrouve sur les murs de la ville, des tranches de vie entre tragique et comique, et les différences que l’on essaie de polir puis qu’on accepte car au fond, c’est précisément ce que l’on aime chez l’autre…

…chukie, jake, roche, aoirghe, max et les autres…

[ C'est le problème quand on ment. Si on ne vous croit pas, vous vous méprisez ; et si on vous croit, vous méprisez l'autre. ]

m i s t e r ; v e r t i g o

p a u l ; a u s t e r

[ je demeurai ainsi près d’une minute, et quand je trouvai enfin le courage de me relever, je sortis de la pièce et me précipitai dans la cuisine et puis dehors dans la nuit froide – assoiffé d’air, assoifé de vie sous l’immensité glacée des étoiles ]

…vie et vertiges de walter claireborne rawley…

[ J’étais nourri et vêtu, j’avais ma chambre à moi. Je n’étais ni fessé ni battu, ne recevais ni coups de pied ni coups de poing, ni taloches sur les oreilles, et pourtant, si tolérable que fût ma situation, je ne m’étais jamais senti plus déprimé, plus rempli d’amertume et de fureur contenue. Pendant les six premiers mois, je ne pensai qu’à m’enfuir. J’étais un enfant des villes, né avec le jazz dans le sang, un gamin des rues, l’œil attentif à l’aubaine, et j’aimais le brouhaha des foules, les grincements des trolley-bus, la pulsation des néons, la puanteur du whisky de contrebande suintant dans les rigoles. J’étais un loustic au pied léger, un scatman miniature à la langue bien pendue, aux multiples facettes, et je me retrouvais planté au milieu de nulle part, sous des cieux qui ne jouaient que sur le temps – presque toujours mauvais. ]

" Le monde est dans ma tête, mon corps est dans le monde. "
Paul Auster

l i n s o u t e n a b l e ; l é g è r e t é ; d e ; l ‘ ê t r e

m i l a n ; k u n d e r a

[ Ils s'étaient créés un enfer, mutuellement, même s'ils s'aimaient. C'était vrai qu'ils s'aimaient, et c'était la preuve que la faute ne venait pas d'eux-mêmes, de leur comportement ou de leur sentiment labile, mais bien de leur incompatibilité parce qu'il était fort et qu'elle était faible. ]

[ Le vertige, c'est autre chose que la peur de tomber. C'est la voix du vide au-dessous de nous qui nous attire et nous envoûte, le désir de chute dont nous nous défendons ensuite avec effroi.

Les hommes qui poursuivent une multitude de femmes peuvent aisément se répartir en deux catégories. Les uns cherchent chez toutes les femmes leur propre rêve, leur idée subjective de la femme. Les autres sont mus par le désir de s’emparer de l’infinie diversité du monde féminin objectif.
L’obsession des premiers est une obsession romantique: ce qu’ils cherchent chez les femmes, c’est eux-mêmes, c’est leur idéal, et ils sont toujours et continuellement déçus parce que l’idéal, comme nous le savons, c’est qu’il n’est jamais possible de le trouver. Comme la déception qui les pousse de femme en femme donne à leur inconstance une sorte d’excuse mélodramatique, bien des dames sentimentales trouvent émouvante leur opiniâtre polygamie.
L’autre obsession est une obsession libertine, et les femmes n’y voient rien d’émouvant: du fait que l’homme ne projette pas sur les femmes un idéal subjectif, tout l’intéresse et rien ne peut le décevoir. Et précisément cette inaptitude à la déception a en soi quelque chose de scandaleux. Aux yeux du monde, l’obsession du baiseur libertin est sans rémission (parce qu’elle n’est pas rachetée par la déception)..
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